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Fin de vie : comment faire respecter ses volontés ?

Crée le : · Mis à jour le : 09/07/2024 15:35:55 · Temps de lecture :
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Sujet intime et délicat par excellence, la fin de vie suscite pourtant nombre de débats collectifs. Tandis que s’est ouverte fin 2022 une convention citoyenne sur le sujet, où en est-on aujourd’hui ? Comment s’assurer que les volontés de son proche en matière de fin de vie seront bien respectées ? Nous faisons le point sur ces questions dans cet article.

Les droits des personnes en fin de vie constituent une préoccupation cruciale des Français, à tel point que les lois en la matière se succèdent depuis une dizaine d’années.

En 1999, un premier texte vise à garantir à tous l’accès aux soins palliatifs, puis au soulagement de la douleur. En 2002, la loi Kouchner instaure pour la première fois le droit de désigner une personne de confiance, et de refuser un traitement. Trois ans après est adoptée la première loi spécifique sur la fin de vie, la loi Leonetti, qui crée l’interdiction de l’obstination déraisonnable – longtemps appelée « acharnement thérapeutique ». Enfin, en 2016, la loi Claeys-Leonetti renforce le rôle de la personne de confiance et le poids des directives anticipées, et introduit le droit à la sédation profonde.

Des droits nombreux, mais qu’il n’est pas toujours facile de s’approprier : le sujet est difficile à envisager pour soi, et à aborder avec ses proches. Pourtant, tout un chacun gagnerait à s’emparer de ces différents dispositifs.

A commencer par les directives anticipées.

Rédiger ses directives anticipées

Ce document officiel a pour but de préciser à qui de droit vos souhaits en matière de fin de vie, même si vous n’êtes plus en capacité de les exprimer : souhaitez-vous être réanimé(e) ? Mis(e) sous respiration artificielle ? Voulez-vous que les traitements soient interrompus ou au contraire poursuivis si votre état de santé semble incurable ?

A noter : depuis la loi de 2016, la nutrition et l’hydratation sont considérés comme des traitements.

Ces volontés doivent être exprimées sur un document écrit, daté et signé. Il doit être nommé « directives anticipées » et porter les noms, prénoms, date et lieu de naissance du signataire.

Elles peuvent être rédigées sur papier libre, ou en utilisant un formulaire, comme celui que propose le ministère de la Santé.

A noter : si le signataire ne peut pas les écrire lui-même, les directives anticipées peuvent être écrites par un tiers, avec l’attestation écrite de deux témoins.

Toute personne majeure peut rédiger ses directives anticipées, y compris les personnes sous mesure de protection (tutelle, curatelle). Les majeurs sous tutelle devront toutefois obtenir l'autorisation du juge (ou du conseil de famille le cas échéant).

Leur validité est illimitée, mais elles peuvent être modifiées ou annulées à tout moment.

Des directives contraignantes…

Ces volontés s’imposeront au corps médical, qui sera tenu de les respecter, sauf dans le cas où il estime qu’elles sont « manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient » (article L. 1111-11 du code de la santé publique).

Dans ce cas, il pourra passer outre à l’issue d’une procédure collégiale, c’est-à-dire en concertation avec l’équipe soignante et au moins un médecin extérieur, qui ne fait pas partie de l’équipe.

En novembre 2022, le Conseil constitutionnel a réaffirmé la validité de ce principe.

… Qu’il est essentiel de faire connaître

Mais pour que les volontés des personnes en fin de vie soient respectées, encore faut-il qu’elles soient connues.

C’est pourquoi il est recommandé d’informer ses proches, son médecin traitant mais aussi sa personne de confiance de l’existence de ces directives anticipées, et de les conserver dans un endroit connu et accessible.

Il est aussi conseillé d’en glisser une copie dans son dossier médical.

Désigner une personne de confiance

La personne de confiance est en charge de transmettre les volontés d’une personne en fin de vie et de s’assurer de leur respect, mais pas seulement.

Lorsque la personne qui l’a désignée n’est pas en fin de vie, elle peut faire appel à cette personne de confiance, choisie parmi son entourage, pour l’accompagner lors de rendez-vous médicaux et l’aider dans sa réflexion et ses choix.

La personne de confiance n’a pas accès au dossier médical de celui ou celle qui l’a désignée, mais peut le consulter si le patient l’y autorise. Et lorsqu’il n’est plus en mesure d’exprimer ses volontés, la personne de confiance s’en fait le relais. Si l’équipe médicale envisage d’arrêter les traitements ou de mettre en œuvre la sédation profonde et continue, par exemple, elle doit consulter en priorité la personne de confiance.

Il est donc essentiel de préciser l’identité de cette personne en annexe des directives anticipées.

Comment procéder ?

Là aussi, la démarche est simple : il suffit de désigner la personne de confiance sur papier libre. Mais il est aussi possible de le faire lors de la rédaction des directives anticipées. Toute personne majeure, en état d’exprimer sa volonté, peut la choisir. Les personnes sous mesure de protection doivent cependant demander l’autorisation du juge ou du conseil de famille, s’il existe.

Soulager la douleur, jusqu’à la sédation profonde

La démarche palliative, par opposition à curative, ne cherche pas à guérir : il s’agit de soulager la douleur, d’apaiser la souffrance physique, de sauvegarder la dignité de la personne malade et de soutenir son entourage, selon les termes de la loi de 1999.

Ces soins peuvent être prodigués à domicile ou en institution. A domicile, il faudra s’adresser à des professionnels de santé libéraux ou à un réseau de soins palliatifs. Côté hôpital, il existe des unités spécialisée (unités de soins palliatifs), des lits dédiés aux soins palliatifs dans certains services et des équipes mobiles, qui peuvent se déplacer pour intervenir dans les autres services.

Bon à savoir :
La loi Claeys-Leonetti de 2016 a par ailleurs introduit un nouveau droit : désormais, une personne atteinte d’une affection grave et incurable, dont le pronostic vital est engagé à court terme et la souffrance est réfractaire aux traitements, peut être endormie de façon profonde et continue, jusqu’au décès.

Des médicaments visant à soulager la douleur lui sont administrés, tandis que les traitements dont l’objectif est de la maintenir en vie sont arrêtés.

La sédation profonde et continue peut-être demandée par le patient s’il est en mesure d’exprimer ses volontés, inscrite dans les directives anticipées, ou décidée par le médecin à l’issue d’une procédure collégiale.

Conseils pour aborder le sujet avec ses proches

Ces droits nous concernent tous, malades ou bien portants, mais peu de Français s’en emparent. En 2019, seuls 13 % d’entre eux avaient rédigé leurs directives anticipées.

Ecrire ses directives anticipées, désigner la personne de confiance qui les portera, permet, d’une part, de mettre au clair ses volontés, et, d’autre part, d’éviter que la responsabilité d’une décision repose sur ses proches : tout le monde gagnerait à s’en préoccuper.

Des avantages qu’il peut être utiles de rappeler lorsque le dialogue s’amorce.

Reste qu’il est difficile d’envisager sa propre fin de vie, ou d’aborder le sujet avec un proche. Cyril Meunier, infirmier à l’institut de cancérologie Strasbourg Europe, s’est penché sur le sujet, et s’est interrogé sur le meilleur moment pour en parler.

Pour lui, c’est au moment où chacun est en mesure de le faire : le patient, ses proches et les professionnels de santé qui le suivent. Il explique aussi que le sujet doit être évoqué à différents moments, pour que le cheminement puisse se faire, que la discussion doit être amorcée en amont pour pouvoir aboutir sur la rédaction du document.

Autre élément à prendre en compte, le temps de chacun, qui est différent.

Il conseille enfin d’aborder aussi les volontés « positives », de parler de l’accompagnement en soins palliatifs dont on souhaiterait bénéficier par exemple.

Pour résumer, il faudra prévoir plusieurs discussions, tout en délicatesse, en étant à l’écoute et en laissant à l’autre la possibilité d’exprimer ses envies, ses peurs.

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